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Jean-Louis SERVERIN
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Vivre, c'est penser, c'est la dynamique de la pensée qui "EST la vivance du sujet humain"... Le processus de représentation constitue le fond d'activité qui assure cette vivance. La représentation du pulsionnel est une condition pour la pulsion de vie. A la suite de Freud par l'importance qu'il accordait à sa "traumdeutung", on peut faire l'hypothèse d'une "confusion des langues" entre une langue de mots adulte et une langue infantile d'images. Avant les mots, avant même la parole dans la confusion entre le maternel et l'infantile, peut- on supposer la survivance de ressentis corporels dont la résurgence dans le Moi pourrait mettre en crise sa dynamique de représentance ? Le délire serait alors l'ultime défense contre l'irreprésentable.
Entre mélancolie et paranoïa, le texte de Philip K. Dick donne à voir les traces sensibles de l'originaire, qui sont à la base de ces deux façons d'être au monde et à soi-même. L'urgence d'écrire répond pour lui à une nécessité d'inscrire dans les mots cet affolement des images et des temporalités, marquant le désarroi du narcissisme primaire et la nécessité d'inventer le symptôme. Le futur ne serait-il que la confiance dans une mémoire espérante ? Au risque d'une désintrication des pulsions de vie et de mort.
Le rêve " voie royale vers l'inconscient " a aussi une fonction de mise en scène des images et des sensations visuelles, imposées par la mémoire perdue " d'avant les mots ". De la disparition des lucioles selon Pasolini à leur survivance. Selon G. Didi-Huberman ; il s'agit d'essayer de rendre compte de la présence dans la création artistique ainsi que dans la cure d'images sensibles primitives en-deçà de celles qui animent l'origine de la pensée de l'enfant ; un phrasé de sensations énigmatiques, langue originaire et origine de la langue et du transfert.
Éprouvés rejetés hors du Moi, qui pourtant peuvent le hanter lorsque la réalité extérieure vient leur faire écho.
Premières lignes...
Ces Journées Scientifiques sur le rêve, ont ouvert un travail de réflexion sur cet en-deçà de la langue de mots que constituent les images qui habitent les rêves ; si les rêves sont la voie royale vers l'inconscient, cette voie est parsemée comme le chemin du Petit Poucet par ces signes énigmatiques que forme la "matière d'images"...
Comment penser à l'écoute de l'hystérique ce trop de pulsionnalité qui sidère ou affole analyste et analysant…
Affolement qui risque d’attaquer voire de détruire le commencement du féminin ? C’est " Détruire dit-elle " titre de l’ouvrage de Marguerite Duras, qui servira de fil rouge à notre réflexion, accompagnée aussi du personnage de Lol V Stein, comme de nos expériences cliniques à la poursuite de ce primitif féminin toujours si inquiet et fragile aussi bien chez les hommes que chez les femmes. La confusion des Langues est au cœur de cette complexité si on pense la langue de la sexualité infantile comme une Langue sensible proche de la langue du rêve. Ce brouillage à l’oeuvre entre enfants et adultes est un des risques de la cure dans le transfert et le contre transfert entre analyste et analysant. L'analyse ne serait-elle pas dans la même inquiétude existentielle exprimée par Jack Hold le narrateur du roman de Marguerite Duras : " Mais qu'est-ce que j'ignore de moi-même à ce point et qu'elle me met en demeure de connaître ? "
Interlignes
Préface du livre sur les Journées Scientifiques 2015 du IV Groupe - Actes 5 - Le meurtre et l'inceste - Éditions InPress - Paris - 2016